C’est le printemps. Le soleil commence à réchauffer mon arbre. Alors sa sève se remet à circuler. Et j’apparais.
Je suis une petite feuille, une feuille simple, d’un vert tendre, dentelée mais tout en rondeur. Nous sommes nombreuses sur notre arbre et une multitude d’autres arbres vivent autour de nous.
Tout l’été se passe dans le plaisir, simplement le plaisir de vivre : sentir le vent, le soleil et la pluie. Mon arbre a de profondes racines qui puisent l’eau nécessaire à notre vie.
Des enfants se promènent autour de nous. Certains grimpent sur nos branches et s’accrochent aux feuilles, menaçant de les arracher. Mais moi, je suis hors de portée : trop haute, trop loin.
Puis arrive l’automne. Les unes après les autres, nous changeons de couleur. Certaines deviennent jaune doré, d’autres rouge écarlate. Moi, je mêle les différentes couleurs du feu. Je me trouve magnifique !
Mais je sens que mon arbre perd de sa puissance et les feuilles autour de moi tombent peu à peu, sans bruit. Que deviennent-elles ? Et puis, c’est mon tour.
Quelle aventure ! Que vais-je devenir ? Je reste là où je me suis posée délicatement. Toutes ensemble, nous formons un épais tapis sous notre arbre.
Puis, voilà un enfant. Il s’approche de moi et me prend dans sa main. Je reprends espoir. Peut-être que de nouvelles aventures m’attendent.
Nous arrivons à destination. Alors l’enfant m’installe entre deux dictionnaires. Je ne vois plus rien ! Je me sens écrasée ! Vais-je mourir ici ?
Pourtant, quelques jours après, il me saisit avec précaution et me dépose sur une feuille blanche (une feuille?). Il me fixe avec du scotch et écrit soigneusement :
Feuille de chêne, prélevée le 15 octobre 2018 au Bois Camus.